ACTH
Art Contemporain et Temps de l'Histoire
Depuis 2004, l’Ensba a mis en place un programme de recherche conduit par l’artiste Bernhard Rüdiger avec des artistes et/ou théoricien·nes qui a pour titre « Art Contemporain et Temps de l’Histoire ».
L’unité de recherche s’interroge depuis longtemps sur les références — parfois problématiques — au réel, à « l’ultra-contemporanéité », au constat de l’aplatissement du temps (ce que l’historien François Hartog, invité lors d’un séminaire, nomme “le présentisme”). L’exercice d’élaboration des œuvres par le regardeur semble avoir muté et s’être adapté à un impératif d’immédiateté, les condamnant bien souvent à une transparence fonctionnelle dans le dispositif spectaculaire. Dans de tels dispositifs, les œuvres peuvent paraître comme coupées de leur histoire et des conditions de leur production. À cette injonction les artistes tendent néanmoins à opposer une certaine résistance en rappelant que la question du « contemporain » dépend, pour l'artiste, de sa capacité à mettre la contingence et le temps au travail. C’est par le prisme des œuvres, qu’ACTH continue d’interroger le rapport à l’histoire, à l’historicité et plus généralement aux temporalités multiples qui les structurent et les traversent.
C’est depuis ce constat qu’ACTH s'intéresse à la condition de la mise en œuvre des formes, aux processus qui les ont déterminées et qui les travaillent encore. Non seulement agent d'une transformation matérielle, le travail artistique est aussi abordé comme une constellation d'événements, d'idées, d'actions, d'expériences, de stratifications qui suspendent le temps, le rendant complexe, anachronique et pris dans un agencement qui change le regard sur ce qui a été fait et ce qui reste à élaborer.
L’unité de recherche ACTH a achève en 2022 la troisième phase de cette recherche initiée en 2016 : À l’endroit du lieu. Elle a permis d'étudier les relations particulières des œuvres à la réalité des lieux dans lesquels elles s’inscrivent et aux stratifications historiques qui se manifestent dans leur actualité.
L’édition du livre Découper le temps en son lieu, publiée en 2019, a permis de publier une partie essentielle de ce travail collectif.
Des collaborations répétées du groupe de recherche avec la Summer School as School à Prishtina ainsi que la rencontre avec des artistes apportant leurs propres réflexions sur la relation au lieu, ont amené le groupe à produire une série de trois expositions successives, ou une seule exposition évolutive, au Réfectoire des nonnes, Inventer le lieu à son endroit ! , dans le cadre du programme Résonance de la Biennale d’art contemporain de Lyon de 2019.
Cette exposition a rendu possible un travail commun à partir de cultures différentes, de territoires et de paysages stratifiés, disparus sans laisser de traces, mais toujours présents à notre expérience muette du monde. Comme souvent dans l’histoire de l’unité de recherche, nous nous sommes appuyés sur des archives, des films, des photographies, des œuvres qui nous ont permis de les déchiffrer.
L’approche politique propre à toute invention du lieu demeure un axe central du projet de recherche. Le cadre méthodologique de l’exposition expérimentale a permis de confronter les approches plurielles des artistes et d'ouvrir une discussion là où chaque œuvre propose une articulation inédite.
Une nouvelle phase de recherche s’ouvre au printemps 2022 après le colloque « Contradiction, antagonisme et négativité » organisée à l’Ensba de Lyon avec Stacion, centre d’art contemporain de Prishtina. Le colloque a questionné la possibilité, voir la nécessité, de (re)penser la négativité au-delà de son paradigme politique et de son évolution à l’époque de la postmodernité capitaliste, pour explorer les stratégies et les pratiques culturelles contemporaines qui semblent réagir à la condition « post-historique » en mettant au travail l’interruption, la répétition, l’altérité radicale ou le négatif de la négativité. Parmi ces articulations les séminaires autour de la figure de Polichinelle (2020-22) ont posé des nouvelles questions. Cet histrion comique du théâtre de rue d’origine napolitaine, interrompt par ses gags l’action des citoyens occupés à leurs affaires sur la place publique et le rend impossible tout progrès de l’histoire. La formulation d’un nouveau paradigme a émergé de ces travaux, développant la possibilité de penser le temps hors de l’histoire à partir de la notion d’interruption, s’appuyant entre autres sur les recherches sur « l’Homo sacer », l’homme saqué (coupé, sectionné), développées par Giorgio Agamben.
La possibilité de penser la syncope, l'interruption des liens perceptifs et cognitifs d’un individu, mais aussi d’une œuvre à son contexte politique, nous semble une voie féconde pour penser et développer par les outils plastiques une autre relation au réel historique. C’est à partir de cette ouverture, que nous nous sommes intéressés à ce qui réside et résiste dans les œuvres et se manifeste malgré nous, en empruntant à Jacques Derrida sa pensée de la « spectralité ».
Reste la question de savoir comment développer une recherche qui a pour objet ce qui se passe entre, dans les béances ? Une des pistes les plus récentes a été de reprendre à notre compte l’action de “sonder”, d’étudier la résonance des objets plutôt que leur présence suggérée par F. Nietzsche dans son introduction au Crépuscule des Idoles, ou comment philosopher à coups de marteau.
- Origine de la recherche - historique
- Formes de vie: contradiction, antagonisme et négativité (2021 à aujourd’hui)
- A l'endroit du lieu (2016 - 2020)
- Le temps suspendu (2010-2016)
- La construction du réel (2004-2009)
- Colloques de l’unité de recherche ACTH
- Publications
- Expositions
- Membres de l'unité de recherche
- Soutenances
- DSRA
- Le Banquet - ACTH
- Summer school as school 2023