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Du 31-03-2022 au 01-04-2022

ACTH - Contradiction, antagonisme et négativité

Scène de village bavard, photographie argentique noir et blanc. Lucas Zambon 2022.

Contradiction, antagonisme et négativité 

Colloque

L’unité de recherche Art contemporain et temps de l’histoire (ACTH) de l’École nationale supérieure des beaux-arts de Lyon organise les 31 mars et 1er avril 2022 le deuxième volet du colloque « Contradiction, antagonisme et négativité ». 

La première rencontre organisée par Stacion – centre d’art contemporain de Prishtina, s’est tenue le samedi 7 août 2021 dans le cadre du programme public de Summer School as School 2021, sous la direction du philosophe Sami Khatib et de l’artiste, commissaire, et critique social, Albert Heta, avec la participation du critique et traducteur Boris Buden et de la poète et théoricienne de l’art Keti Chukhrov.

Cette première rencontre à Prishtina a posé le cadre de la discussion et a permis de saisir le lien étroit qui lie la société (post)moderne aux diverses formes de négativité, d'antagonisme et d’exercice de la contradiction, en particulier dans les domaines de la théorie critique, de la politique post-coloniale, de la psychanalyse, de l'esthétique et des études queer et féministes. Prenant en compte la courte histoire du modernisme du XXe siècle, la conférence a questionné la possibilité, voire la nécessité de (re)penser la négativité au-delà de la postmodernité capitaliste. À une époque prétendument « post-historique », la négativité est-elle devenue trop négative pour « fonctionner » ?

Le deuxième volet du colloque, « Contradiction, antagonisme et négativité », sous la direction de Bernhard Rüdiger, directeur de recherche ACTH, toujours accompagné par Sami Khatib et Albert Heta, se propose d’explorer des stratégies et des pratiques culturelles contemporaines qui semblent réagir à la condition « post-historique » en mettant au travail la répétition, l’altérité radicale ou le négatif de la négativité.

La stase, le gag ou la suspension, peuvent apparaître dans les luttes sociales contemporaines comme des formes d’antagonisme raté, une amnésie, ou pire, un renoncement à la lutte ; des formes radicalement négatives qui, tout en réagissant à une situation d’impossibilité, prennent la part négative de la négativité. Elles ne semblent pas vraiment correspondre à ces formes hésitantes et répétitives qui, dans la pensée de Marx, ont caractérisé les révolutions prolétaires et plus généralement la résistance des « opprimés ». On pourrait analyser ces formes bien présentes dans les stratégies artistiques contemporaines, comme une autre forme d’antagonisme négatif. Il se peut qu’il ne s’agisse pas d’un renoncement à la lutte, mais qu’on soit en présence de formes vitales, tout dirigées à défendre l’exigence d’une autre forme de vie. Giorgio Agamben observe à ce propos dans son petit livre sur Polichinelle que le gag de cette figure populaire de tradition napolitaine n’est pas simplement impolitique, mais qu’il « annonce et exige une autre politique, qui n'a plus lieu dans l'action, mais montre ce que peut un corps quand toute action est devenue impossible ».

Conférences:

Keti Chukhrov, professeure agrégée au Département de philosophie et des études culturelles à l’École des hautes études en sciences économiques, HSE Moscou.

Albert Heta, artiste, chercheur en critique sociale, cofondateur et directeur de Stacion CCA Prishtina et de Summer School as School.

Sami Khatib, philosophe, professeur à l'université des arts et du design de Karlsruhe (HfG) et membre fondateur du Beirut Institute for Critical Analysis and Research (BICAR). 

Jennifer Lauro Mariani, dramaturge, metteuse en scène, chercheuse associée au sein de l'unité de recherche ACTH. 

Chiara Palermo, commissaire d’exposition et docteure en philosophie, directrice des études à L’ENSA Limoges.

Marion Roche, artiste, doctorante en esthétique à Lyon 3 et membre de l'unité de recherche ACTH.

Bernhard Rüdiger, artiste, directeur de l'unité de recherche ACTH.

Performances et œuvres:

Anna Holveck, artiste, compositrice et chanteuse, membre de l'unité de recherche ACTH.

Maxime Juin, artiste, écrivain et membre de l'unité de recherche ACTH.

Michala Julínyová, artiste et membre de l'unité de recherche ACTH.

Sophie Lamm, artiste et membre de l'unité de recherche ACTH.

Lucas Zambon, artiste et membre de l'unité de recherche ACTH.

Contradiction, antagonisme et négativité, topos

Sigmund Freud a diagnostiqué un « Unbehagen in der Kultur », un mécontentement, un trouble, un malaise dans et avec la culture et la civilisation modernes (1930). S'inspirant de cet affect négatif, la conférence invite à une conversation dans un cadre conceptuel plus large, basé sur les figures de la négativité, de l'antagonisme et de la contradiction. Dans la pensée continentale moderne, le terme de négativité a été théorisé, affirmé et désavoué de diverses manières. Selon G. W. F. Hegel (1807), la négativité est à la fois formatrice et instable : elle est le mouvement et la force motrice de la formation culturelle et de l'éducation (Bildung). Cette « inquiétude du négatif » (Jean-Luc Nancy) a pourtant fini par supplanter son héritage hégélien. En tant que lieu de conflit et figure de pensée, la négativité dépasse les frontières intellectuelles et géographiques de la modernité occidentale : les lieux mondialisés de la lutte des classes et de la colonialité peuvent être théorisés comme des lieux de négativité.

Avec l'histoire « inégalitaire et conjuguée » de la modernité – du colonialisme et du capitalisme industriel – les expériences collectives d'antagonisme de classe, d'aliénation psychosociale, d'exploitation économique et de séparation, bien qu’elles soient elles-mêmes destructrices et destituantes, sont devenues constitutives des relations sociales. Dans un monde où « tout ce qui est solide se fond dans l'air » (Marx/Engels 1848), la vie collective finit par manquer de solidité habituelle, de stabilité et de prévisibilité. En fait, la négativité, en tant que concept philosophico-critique, expérience perturbatrice et véritable force de destruction, a des dimensions « productives ». Fonctionnant presque comme un « vitalisme inversé », une vie provoquée par la mort, la négativité met à l'épreuve les concepts (post)modernes d'identité, de stabilité, de substance, d'essence, de souveraineté et de structure. Dépourvue de définition fixe, la négativité est un concept fluide, fugitif et dialectique qui met à mal les oppositions statiques et les frontières claires.

Ce flou conceptuel s'avère productif lorsqu'il est lu comme un symptôme de la négativité réellement existante dans les relations sociales du capitalisme tardif dans les approches culturelles, esthétiques, psychosociales et linguistiques.

Jeudi 31 mars et vendredi 1er avril 2022

Entrée libre, dans la limite des places disponibles

Retransmission en direct des conférences et captation des performances retransmises en différé. Rendez-vous sur notre chaine YouTube.

Grand amphithéâtre et plateau son 2e étage

A partir de 9h30